Bonne lecture à tous !
PS : S'agissant d'un extrait quelques renvois pourront sembler obscurs, quelques positions pourront paraître "tronquées", si cela devenait trop perturbant, n'hésitez pas à consulter le document intégral.
Les missions des médiateurs
La mission principale d'un médiateur [le terme médiateur tel que définit dans le texte original concerne exclusivement les médiateurs "face-publics"] est le plus souvent de réaliser des médiations orales. L'objectif in fine est de permettre échanges et réflexions en vu de l'émergence d'une culture scientifique et technique. Un des moyens ou une des conditions pour se faire, est de rendre les objets et concepts "accessibles" aux publics. Le médiateur est ainsi tout à la fois :
- animateur d'une réflexion personnelle et collective, et d'échanges entre les publics,
- participant de ces échanges en tant que personne et/ou en tant qu'institution,
- intermédiaire entre d'une part les objets et concepts et d'autre part les publics et leurs conceptions.
mobilisent des compétences proches mais les distinguer devient nécessaire face à une équipe de médiateurs nombreux. En effet, dans ce cas et pour des raisons organisationnelles, les médiateurs sont amenés à réaliser des médiations qu'ils n'ont pas conçues. Chaque médiateur peut être amené alors à concevoir pour d'autres médiateurs qui n'ont d'ailleurs que peu de chance d'avoir des profils tous similaires. Cette spécificité de la distinction entre les deux fonctions principales d'un médiateur : la réalisation et l'élaboration de la médiation, au sein d'une équipe de médiateurs nombreux, éclairera certains des enjeux, certaines difficultés et certaines solutions liés à leurs formations.
Des compétences à avoir ou à acquérir
Réaliser ou élaborer des médiations orales nécessite un certain nombre de savoirs et savoirs-faires. Les premiers éléments qui viennent à l'esprit lorsqu'on cherche à définir ces besoins sont les suivants :
- les contenus : en général, dans le domaine de la Culture Scientifique et Technique, ils sont envisagés sous le seul angle des notions et concepts scientifiques sur laquelle la médiation se base,
- les techniques d'animation : là encore elles sont souvent envisagées de façon limitée aux seules techniques de communications, voir de gestion de groupe.
- le cas spécifique des connaissances et de la culture de ce que revêt ce que l'on appelle la Culture Scientifique et Technique
- les formations de fond qui sont spécifiques aux métiers de médiateurs en musées de sciences (contenus scientifique, technique de médiation, vulgarisation, pédagogie, ....)
- les formations propres à l'établissement dans lequel oeuvre les médiateurs et le cas particulier de chaque offre de médiation proposée aux publics.
La culture de la CST
Tout d'abord un parallèle assez amusant à faire entre acteurs de la Culture Scientifique et Technique et les chercheurs scientifiques. Les acteurs de la CST sont nombreux à relever le peu de culture des chercheurs relatif aux domaines des sciences ou des techniques. Pourtant ils sont bien moins nombreux à se rendre compte du manque similaire dans leurs rangs, à savoir le peu de culture des acteurs de la CST concernant cette dernière.
Cette remarque est particulièrement vérifiée chez les médiateurs et peut être expliquée par de nombreux facteurs. Sans vouloir être exhaustif, on peut citer : le faible nombre de formations adéquates, les a priori importants des structures et des acteurs sur les nécessités d'une culture scientifique plutôt que d'une culture de la CST, les faiblesses des cadres théoriques sous-jacents aux métiers particuliers de médiateur culturel en musée de sciences...
Une des conséquences principales de ce manque est dans la difficulté des acteurs opérationnels de la Culture Scientifique et Technique à définir leur métier, à valoriser pour eux-mêmes leurs propres fonctions. Une autre conséquence se retrouve dans la difficulté pour des médiateurs de clarifier leurs objectifs et de les prioriser, cela en situation de réalisation d'une médiation mais encore plus lors de l'élaboration de ces dernières.
Trop souvent de part ce positionnement difficile, les médiateurs en sont réduits à chercher ailleurs leurs références, niant par là les spécificités de la Culture Scientifique et Technique. Les références appelées alors peuvent être celles : du monde de l'animation, de celui de l'éducation et de l'apprentissage, du monde de la recherche... Attention, il ne s'agit pas ici d'ignorer que la médiation orale en Culture Scientifique et Technique, par sa position, emprunte à ces divers domaines, du point de vue théorique d'ailleurs comme du point de vue pratique. Mais elle a ses enjeux propres, pas toujours en accord avec les autres domaines qu'elle côtoie.
Retour d'expérience : l'élaboration des médiations au Muséum de Toulouse
Dans le cadre de l'élaboration des médiations au Muséum de Toulouse, les médiateurs sont appelés à écrire une version la plus détaillée possible de ce qui se passe et de ce qui se dirait en situation de réalisation de la médiation. Nous verrons plus loin le pourquoi et le comment de cette méthode.Une conséquence pratique et visible du manque de connaissances et de réflexions concernant la CST parmi les médiateurs du Muséum de Toulouse, est la sur-importance donnée aux contenus dans l'élaboration des médiations. Beaucoup de médiateurs, et notamment les médiateurs originaires du monde scientifique, ont des difficultés à : limiter leurs recherches de contenus, limiter la masse des contenus "à diffuser" aux publics, ne pas tomber dans le "déroulé scolaire ou universitaire". Pourtant, ceux sont ces mêmes médiateurs qui sont appelés à réaliser ces médiations sur le terrain et qui sont donc les premiers confrontés aux conséquences de la sur-importance des contenus scientifiques.
Les savoirs et savoirs-faires de fond
Les notions scientifiques
Parmi les savoirs et savoirs-faires nécessaires à la médiation orale dans un musée de sciences, ils en aient d'évidents qui pourtant ne sont pas exempts de difficultés et de questionnements. Ainsi, réaliser une médiation sur un sujet, un concept, un objet de ces institutions, nécessite d'avoir quelques connaissances scientifiques. Cette évidence cache pourtant une difficulté majeure. Les médiateurs sont amenés à aborder un très grand nombre de sujets scientifiques et pourtant ils ne peuvent être ou devenir spécialistes de tout. Comment résoudre cette ambiguïté ? Comment définir le niveau de connaissances nécessaires et/ou acceptables ? C'est en partie cette difficulté que les médiateurs retrouvent lors de leurs recherches préliminaires à l'élaboration d'une médiation et dont on a parlée précédemment.De même, nous verrons plus tard l'intérêt des profils non scientifiques dans les équipes de médiation. Mais ces derniers posent alors la question du : comment acquérir même un minimum de connaissances scientifiques lorsqu'on en est complètement dépourvu au départ ?
Les autres contenus
Parallèlement aux notions purement scientifiques, les médiateurs sont amenés à devoir connaître un très grand nombre d'autres contenus. On pensera aux données historiques, à l'origine des objets présentés, aux anecdotes... Le problème n'est pas tant la précision des données que leurs nombres. Pour ne prendre que l'exemple des objets, les musées de sciences en présente un très grand nombre : le Muséum de Toulouse en expose pas loin de 8000 hors collections vivantes. On ne peut décemment pas demander aux médiateurs de "connaître" même succinctement l'ensemble des objets présentés.Les techniques de communication ou d'animation
L'autre grand versant des compétences et connaissances nécessaires à une médiation et assez directement identifiable sont les compétences liées à l'animation d'un groupe. Elles sont aussi importantes que les précédentes car avant de parler il faut "savoir de quoi on parle" mais il faut aussi "savoir parler". Ce "savoir parler" devient extrêmement complexe lorsque l'on place comme enjeu non pas l'expression d'un savoir, comme dans un cours universitaire, mais l'émergence d'une culture. Il suffit de penser à l'importance que peuvent prendre alors des concepts comme : l'écoute, le plaisir des publics, leurs motivations, la peur de l'autre, l'expression personnel de chacun, les chocs culturels, les a priori... Pour comprendre que ce "savoir parler" devient "savoir animer" et qu'il mobilise alors des compétences très fines notamment issues de la communication.Des compétences liées à l'élaboration
Comme nous l'avons vu plus haut, les médiateurs ont bien souvent en plus de leurs missions sur le terrain à élaborer les médiations orales. Cette fonction va nécessiter des compétences supplémentaires en relations avec celles citées ci-dessus.Un premier groupe de ces compétences correspond à ce que l'on pourrait appelé "la vulgarisation scientifique". En effet avant de mettre en culture, de partager, d'échanger, il faut avoir accès. On a déjà précédemment parlé de cette fonction "support" qui consiste à "transmettre" une information accessible. Pour cela il faut savoir comment transférer un concept ou une notion, exprimée et connue dans un contexte scientifique, dans le contexte des publics. Ces compétences seront proches de celles mobilisées dans l'écriture "de vulgarisation" ou dans celles mobilisées par la conception d'une exposition.
Un deuxième groupe de ces compétences correspond à ce que l'on pourrait appelé "l'animation pédagogique". Il s'agit des compétences que l'on demande à tout animateur professionnel, au sens large. Elles doivent permettre à la médiation de suivre au mieux sont publics dans toutes ses facettes. On pensera par exemple à : la connaissance des stades de développement de l'enfant, comment rythmer une animation pour maintenir son public actif et participatif, quels sont les indicateurs de participation des publics que l'on peut relevé pendant l'animation, ...
On peut voir dans ce dernier cas que ces compétences sont également utiles en situation de réalisation d'une médiation mais c'est bien lors de l'élaboration qu'elles seront le plus mises en oeuvre.
Des savoirs et savoirs-faires propre à l'établissement
Dernier champ de compétence à prendre en compte dans ce tour d'horizon, les savoirs et savoirs-faires propre à l'établissement dans lequel opèrent les médiateurs. Il ne s'agit bien entendu pas ici de relever tous les besoins spécifiques d'un médiateur dans une structure particulière, cela n'aurait que peu d'intérêt. Par contre, il convient malgré tout de souligner certains aspects de ces besoins qui sont cruciaux pour les établissements et qui soulèvent des questions de fond.
Médiateur représentant
Le premier point à relever est que le médiateur est comme tout personnel de l'établissement représentant de celui-ci auprès des publics. Une différence de taille par rapport aux autres personnels est que de part sa fonction, il est plus souvent appelé à répondre aux questionnements des publics, voir à s'exprimer au nom de l'établissement. Cela est d'autant plus vrai quand la médiation permet l'échange au sens où nous l'avons vu plus haut. Ainsi, les grands axes de la politique de l'établissement doivent lui être connus. Les positions de l'établissement devant telle ou telle question doivent lui être transmises.Deux exemples sont couramment vécus aux Muséum de Toulouse. Il s'agit d'une part du positionnement de l'établissement face aux grands débats écologiques qu'il se propose de porter auprès des publics. Il s'agit d'autre part du statut municipal de cet établissement qui implique une dimension de service public qu'il faut avoir intégrée, réfléchie pour la mettre en oeuvre au mieux dans tous les échanges avec le public et plus largement dans tous les aspects du métier.
Médiateur spécialiste du fonctionnement
Comme nous venons de le voir, les médiateurs sont de part leur fonction, représentant de l'établissement auprès des publics. Non seulement, ils doivent être capables de le faire sur les positions "officielles" que prend l'établissement mais ils doivent aussi être capable d'en expliquer le fonctionnement. En effet, les publics sont multiples et ont souvent des demandes qui dépassent largement les contenus de la médiation orale. On peut penser par exemple que les médiateurs doivent être en capacité de répondre aux questions relatives à ce qui se passe dans l'établissement. Cette connaissance peut apparaître anodine dans beaucoup de petites structures. Mais dans un établissement plus important et/ou plus dynamique du point de vue de l'offre, elle devient complexe et difficile à mettre en oeuvre. Le médiateur doit connaître suffisamment par exemple la programmation des conférences ou des films pour répondre aux questions des publics.Un autre exemple de cette connaissance des fonctionnements, qui prend une tournure délicate dans les grandes structures, est la maîtrise des fonctions des différents services et personnels de l'établissement. En effet, face à une demande d'un public, le médiateur doit être en capacité d'orienter convenablement et vers les bonnes personnes.
Les médiateurs face à une médiation spécifique
Enfin, nous avons vu que pour pouvoir élaborer ou réaliser une médiation, les médiateurs doivent faire preuve de nombreux savoirs et savoirs-faires. Pour l'instant, nous avons exprimé ces besoins de façon générique, dans l'absolu. La question se repose maintenant de façon différente si l'on se réfère à une médiation spécifique.En effet, en plus des connaissances et compétences globales liées à leurs fonctions, les médiateurs ont à acquérir celles spécifiques à chaque médiation qu'ils ont à réaliser sur le terrain. Chaque médiation mobilise des notions particulières avec des modalités de transmission ou de vulgarisation particulières également. Toutes les médiations n'ont pas non plus les mêmes formes et une visite, un atelier, la déambulation d'un personnage ne mettent pas en jeu les mêmes dynamiques de groupes, les mêmes types d'interactions avec les publics.
Comme on l'a déjà signalé pour les notions scientifiques d'ordre général, les médiateurs ne peuvent être spécialistes de tout, et dans ce cas ne peuvent être spécialistes de toutes les médiations. Ainsi la question de l'apprentissage d'une médiation particulière devient vitale. Cette question est d'autant plus importante dans des musées tels que le Muséum de Toulouse car les médiateurs qui y réalisent une médiation ne sont pas forcément ceux qui l'élaborent. Comment faire alors pour transmettre une médiation d'un "élaborateur" à un "réalisateur" sans en perdre l'essentiel, sans perdre trop de temps, en garantissant le respect d'objectifs de haut niveau liés notamment à la mise en culture.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire